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A vos plumes !



Avant d’entrer dans le sujet de cette lettre d’information, je propose d’étudier le caractère fongible du « chef-d’œuvre » dans le temps. À l’origine, un travail de réception des compagnons du devoir. Aujourd’hui, un machin d’affichage, casse-tête des copains de classe en sections professionnelles. Pour le premier, un rituel initiatique chargé de sens, celui censé toucher l’âme. Pour le second, un élément de langage de plus en moins, pour partie vide de sens. Historiquement, le « chef-d’œuvre » était l’accomplissement, la sublimation, d’un chemin vertueux. Il se commettait au sein d’un collectif structuré et structurant. Le « chef-d’œuvre » d’aujourd’hui se conclut par une note. Soupirs. Faire et évaluer versus s’approprier et sublimer.
Le « chef-d’œuvre » inclusif - si l’on peut croire en pareil dessein - cherche sa fonction, au milieu de tout cela, depuis l’initiative législative louable et ambitieuse de 2005, où le handicap individuel devait trouver sa place au sein d’un collectif accompagnant. Sauf que oui, mais quand même un peu non !

Au commencement, on accueillit un élève par école. Et chacun d’y mettre tout son cœur. On découvrait la collaboration pluridisciplinaire. Les portes s’ouvraient, les adultes s’apprenaient et tous les élèves se nourrissaient de la différence. C’était l’bon temps de l’inclusion artisanale, avec l’âme des compagnons du devoir…

Ensuite, on géra un élève par classe. L’obédience nationale structura les instances, consolida les outils, densifia l’accompagnement. On entrait dans l’ère industrielle, voire dans le temps classiquement connu et souvent irréversible de l’usine à gaz. On a tous cru qu’on allait y arriver, car on allait nous accorder le temps de l’humain, puisqu’on avait tiré les leçons du keynésianisme. Mais la demande explosa et la logistique ne suivit pas.

Alors les chaînes de montage commencèrent à se gripper. La gestion impossible d’un élève fit imploser une école par ici. Un enseignant référent s’asphyxia sous les dossiers par là. Un PIAL se retrouva fort dépourvu quand la disette des AESH fut venue. Et une famille se brisa face à l’absence de prise en charge de son petiot. Bref, toute la mécanique déconna sans qu’aucun n’écoutât l’appel de l’IEN à se hâter lentement, à considérer la complexité, à analyser plutôt qu’à s’entêter, à ouvrir les yeux plutôt qu’à masquer la triste réalité….

Le « chef-d’œuvre » inclusif auquel nous avons cru, croyons et croirons toujours s’est progressivement mué en quadrature. Faire plus avec moins, en affichant sourire et optimisme… Comme d’hab’, quoi !
Mais que personne ne s’inquiète, en 2024, la situation est sous contrôle et les solutions arrivent ! Changements d’acronymes, mutualisation des moyens déjà mutualisés, structures fleurissant comme pivoines sous la neige, rapidité / qualité en chaque lieu et toutes ces sortes de biais médiatiques. Ayeeeez, cooonfiaaaance !

Le « chef-d’œuvre » inclusif n’est pas une vue d’esprit. Il est (encore) possible collectivement. Mais pour cela, il faut d’abord écouter ceux qui le commettent au quotidien. Il faut du temps, il faut des gens, il faut de l’argent, il ne faut pas juste un pansement !

Karl, mais pas la gare feld, un fonctionnaire qui n’a pas (encore) le sentiment du devoir inclusif accompli…

mais ça va venir, parce que l’on y croit tous sincèrement !

 

2pivoines neige

Mardi 10 octobre 2023, un message s’affiche sur le téléphone portable : « Madame l’Inspectrice, j’ai besoin d’échanger avec vous, quand puis-je vous appeler ? »
Ritournelle habituelle.

Madame A est coordonnatrice d’un des 3 PIAL de la circonscription : « 48h, il nous manque aujourd’hui 48h pour couvrir les besoins des élèves en situation de handicap sur le secteur ».
En juillet nous avions pourtant tout organisé, l’ensemble des besoins était couvert. Oui, mais, c’était sans compter sur :
- les notifications MDPH arrivées durant l’été,
- les élèves ayant déménagé et surtout emménagé sur le secteur,
- les AESH ayant trouvé un emploi plus rémunérateur ou ayant simplement décidé de jeter l’éponge, de laisser tomber ce métier précaire, qu’elles occupent sans formation, et qui ne les rémunère pas à la hauteur de ce qu’elles engagent comme énergie.

Bref, un sacré bazar s’est glissé dans les magnifiques tableaux Excel propres et nets de début juillet.
Nous nous penchons encore sur ces vilaines grilles, sélectionnant les heures attribuées aux élèves, essayant d’associer AESH et élèves, et tentant vainement d’avoir une attention pour la RH. Et les besoins éducatifs particuliers des élèves me direz-vous ? Vaste fumisterie que cette belle expression, pourtant porteuse de si belles intentions… Et j’en veux pour preuve la suite :

Appel de l’IEN aux services chargés du recrutement des AESH :
- « Mme Carré, (ou Cubique ?), le PIAL est en difficulté, nous aurions besoin de 2 à 3 AESH supplémentaires pour couvrir les besoins, »
- « Mais Mme l’Inspectrice, si je regarde les tableaux transmis, vous êtes à +2. »

L’explication donnée est hallucinante :

- « Les AESH en congé longue maladie et en congé maternité sont comptabilisées dans les moyens disponibles »,
- « Ah oui mais elles ne sont pas disponibles ! »,
- « C’est ainsi, puisqu’elles ne sont pas remplacées… »,
- « Mais elles ne sont pas présentes et je ne peux donc pas les mobiliser ! »,
- « Et puis vous couvrez les besoins des élèves notifiés AESH mutualisée à hauteur de 6 heures, c’est 3 heures maintenant. »

Et là, le service dédié, certainement sur ordre hiérarchique, a décidé d’imposer le volume horaire d’accompagnement de ces élèves et n’en a informé… personne !!!
Les bras m’en tombent, la mâchoire se décroche, ma petite voix intérieure me glisse (clin d’œil à mes amis du grand Nooord, les initiés comprendront) : « Ferme eut bouc tin nez y va caire eud dan ».
L’argumentaire est censé me convaincre ; « débrouillez-vous » avec les moyens que l’on vous donne et ne venez pas me parler de contraintes de territoire, ni d’humain surtout, surtout pas d’humain, vous m’embrouilleriez les neurones ! Je ne suis pas programmée pour répondre à cela !

Bon, bon, bon, je cherche la baguette magique que l’on a certainement glissée dans les magnifiques diaporamas présentés à l’IH2EF sur l’école inclusive. Je ne la trouve pas, un oubli sans doute !

Lundi 16 octobre : appel de Mme Carré (si, vous savez, la dame des services…) : « Mme l’Inspectrice, nous venons de recevoir une mise en demeure de la famille de Léna H., vous devez absolument assurer son accompagnement à hauteur de 24h… ». Les bras m’en tombent, la mâchoire se décroche et ma petite voix intérieure me glisse (vous avez compris…) !
Bon, puisque je dispose de 4 AESH fantômes, je vais bien pouvoir attribuer l’une d’entre elles à l’accompagnement de Léna !
Vendredi 24 novembre : nouveau message d’une directrice : « Madame l’Inspectrice, j’ai besoin d’échanger avec vous, quand puis-je vous appeler ? »

Ritournelle grinçante.
« Julien, 4 ans, présentant des troubles du comportement, violent avec les autres enfants, vient de jeter une chaise sur un autre élève alors que nous étions à la bibliothèque municipale, a violenté son AESH qui tentait de le maîtriser, et s’est précipité à l’extérieur en courant. Nous avons réussi à le ramener mais l’équipe est sous le choc, les élèves traumatisés, et nous ne savons plus comment faire avec cet élève. »
Honnêtement, moi non plus ! Je n’ai toujours pas retrouvé cette fameuse baguette magique…
Mais je ne le dis pas, je compatis, j’accompagne pour la 25ème fois cette équipe : faits établissements, déplacement de la psyEN, rencontre avec la famille solidement installée dans le déni. Malgré l’accompagnement par l’ensemble de l’équipe de circonscription et les partenaires, les tentatives pour mettre en place différents outils qui lui permettraient de gérer au mieux sa frustration, nous sommes démunis face au comportement de cet enfant qui souffre, des élèves de la classe qui souffrent, de l’équipe qui souffre mais qui pourtant s’accroche. Rien, nous ne disposons d’aucun dispositif efficace qui permette de sécuriser le parcours de cet élève (et des autres élèves de la classe par la même occasion)… Ecole inclusive, oui, à tout prix, mais à quel prix ?

Jeudi 11 janvier : rendez-vous de carrière programmé dans la classe de Mme M. 9ème échelon, PE expérimentée, un très beau moment de vie de classe. L’entretien fait état de solides inquiétudes quant à l’inclusion de Stan, élève pour lequel un diagnostic TSA a été posé, associé à un TDAH et qui ne dispose que (?) de 12h notifiées. « C’est dommage Mme l’Inspectrice, il est absent ce matin, vous auriez pu me conseiller. » Malgré mes différentes tentatives pour recentrer le propos autour de la maîtrise des compétences professionnelles, elle a besoin de déballer, alors déballons… « Vous savez, il est quand même très difficile de rester calme et d’assurer les apprentissages sereinement quand un élève vient vous lécher les jambes ! ». Une nouvelle fois je compatis, questionne et tente d’apporter les conseils attendus. Il faudra que je vérifie, il doit y avoir un grimoire dans les magnifiques diaporamas, je suis certainement passée à côté. Pourvu qu’ils n’aient pas oublié de me le laisser.

Lundi 22 janvier : nouveau message : « Madame l’Inspectrice, j’ai besoin d’échanger avec vous, quand puis-je vous appeler ? » Irritante ritournelle.
Mme A, coordonnatrice du PIAL, « Il nous manque 18h, j’ai contacté le coordo second degré mais cela s’annonce difficile, les AESH affectées au collège ne se déplaceront sur les écoles du secteur que sous certaines garanties (proximité du domicile, possibilité d’arriver après l’heure de début de classe pour accompagner leurs enfants à l’école, assurance de pouvoir retrouver leur poste au collège à la rentrée). » Pardon ? Allez, je retourne au front auprès du principal de secteur, repositionnons les modalités de fonctionnement du PIAL.

Mardi 23 janvier : Sujet réglé ! Ouf ! Nous avons « trouvé » ces 18h, pourvu qu’il ne nous tombe pas une mise en demeure dans 2 jours…
« Au fait ! Mme A, où en sommes-nous de l’accompagnement des élèves disposant d’une notification mutualisée ? » « Mme l’Inspectrice, aujourd’hui nous n’accompagnons qu’à hauteur de 1h30… ».
Bon, bon, bon, je me raccroche les bras et la mâchoire, peut-être que la mise en œuvre des PAS assurera à chacun des élèves en situation de handicap, la possibilité de bénéficier de la compensation nécessaire à ses besoins éducatifs particuliers. Optimisme, quand tu nous tiens !!!

Hermione – IEN CCPD –
Sorcière à ses heures perdues, sans baguette ni grimoire…

1Sorciere

Le médico-social doit jouer un rôle crucial dans la réussite de l'école inclusive. Cela implique une collaboration étroite avec l'École pour répondre aux besoins particuliers des élèves en situation de handicap et faire évoluer l’environnement scolaire.
Différents points de coopérations professionnelles et de collaborations sont à développer car il convient que les professionnels du secteur médico-social puissent à présent pleinement :
➢ contribuer à une évaluation approfondie des besoins des élèves en situation de handicap. Cette évaluation aide à comprendre les défis spécifiques auxquels chaque élève est confronté et guide la mise en place de mesures d'accompagnement adaptées.
➢ jouer un rôle dans l'accompagnement des élèves, en travaillant en collaboration avec les équipes éducatives pour mettre en place des stratégies d'apprentissage adaptées.
➢ partager leurs connaissances et leur expertise avec les enseignants et autres professionnels de l'éducation.
➢ contribuer à l'adaptation des environnements scolaires pour répondre aux besoins physiques et sensoriels des élèves en situation de handicap.

La collaboration étroite entre le médico-social et l’école est essentielle pour garantir une prise en charge globale des élèves en situation de handicap. Une communication régulière, des échanges d'informations et une coordination efficace entre nos deux secteurs sont indispensables pour assurer la réussite de l'école inclusive.

Quels pourraient-être aujourd'hui les leviers d'une coopération de qualité entre le secteur médico-social et les professionnels de l'école ?

Ces leviers visent à surmonter les freins potentiels et à encourager une collaboration efficace. Il apparait comme nécessaire et urgent de :
➢ structurer la coordination entre les acteurs et faciliter la communication ;
➢ développer des formations communes des professionnels, contribuer à une meilleure compréhension mutuelle des rôles et des compétences de chacun et favoriser les pratiques collaboratives et la construction d'une culture de coopération.
➢ Encourager le développement de compétences interprofessionnelles.
➢ Développer la mise en œuvre partagée des projets personnalisés de scolarisation (PPS) en lien étroit avec les parents.
➢ Mettre en place des protocoles et des outils sécurisés pour le partage d'informations entre les professionnels peut améliorer la continuité des actions entre le milieu médico-social et l'école, tout en respectant les règles de confidentialité.
➢ Promouvoir une culture inclusive au sein des établissements scolaires pour favoriser la compréhension et le respect de la diversité.
➢ Contribuer à encourager une collaboration de qualité par un soutien institutionnel fort au niveau national, les structures médico-sociales et les établissements scolaires relevant de ministères différents, ce qui a tendance à créer de véritables silos institutionnels. En effet, les politiques éducatives et médico-sociales sont régies par des cadres législatifs distincts, parfois complexes et dans des logiques spécifiques.
➢ Organiser des réunions régulières entre les professionnels de l'éducation et du médico-social pour échanger sur les besoins des élèves, échanger des informations et coordonner les interventions.
➢ Impliquer activement les parents dans le processus de collaboration pour renforcer la cohérence entre les différents contextes de vie de l'élève (école, domicile, structures médico-sociales).

L’enjeu est de parvenir à créer un environnement propice à une coopération de qualité entre le secteur médico-social et les professionnels de l'école, favorisant ainsi l'inclusion et la réussite des élèves en situation de handicap.

Certains professionnels peuvent être réticents à adopter de nouvelles approches de travail ou à collaborer de manière plus étroite. La résistance au changement provient généralement de l'incertitude quant aux rôles, prérogatives et aux responsabilités de chacun dans le cadre de cette coopération. Il conviendra de lever ces incertitudes souvent basées sur une méconnaissance de l’autre. En ce qui nous concerne, ce sera toujours notre expertise professionnelle et pédagogique qu’il conviendra de porter haut.

Pierre-Henri, IEN issu de l'agriculture raisonnée

 

6medico sociaux

Dans le cadre des rencontres entre les syndicats de l’Unsa-Éducation et le ministère sur le dossier de l’école inclusive, qui s’est tenue ce 4 décembre 2023, voici le compte-rendu d’une nouvelle réunion du groupe de travail « école inclusive » de l’Unsa-Éducation, à laquelle le SI.EN a participé.

La réunion de ce jour était centrée sur la mise en œuvre des PAS, qui sont supposés remplacer progressivement les PIAL. UNSA-Education, SNPDEN et SIEN ont croisé leurs analyses sur ce nouveau dispositif.
Que retenir ?

D’une façon générale tous les participants sont unanimes pour pointer :
Le grand flou qui accompagne ce projet, comme si le ministère lui-même n’avait pas vraiment pris la mesure et les conséquences de cette mise en œuvre dont le calendrier lui-même est peu lisible. Bien des points clés de ce nouveau dispositif ne semblent ni définis, ni budgétés.

L’absence de lisibilité politique sur ce dossier complexe qui ne semble toujours pas prioritaire pour notre ministère hormis la question de la simple gestion de l’accompagnement humain, toujours en progression au fil des années.

D’une façon plus spécifique les échanges ont mis en relief :
➢ Le grand flou qui accompagne les nombreuses futures missions du coordonnateur, et leur extrême complexité, entre gestion des AESH, concertations avec les familles, appui aux enseignants, traitement des recours, animation de la commission…
➢ La grande inquiétude liée à la responsabilité des personnels dans les contentieux qui vont immanquablement surgir ;
➢ Le champ de compétences réel de la nouvelle commission et son articulation voire sa complémentarité avec les instances de la MDPH ;
➢ La question de la formation de l’ensemble des personnels et plus particulièrement l’absence d’une volonté d’engager un plan ambitieux de formation d’enseignants spécialisés alors que la situation est déjà très dégradée ;
➢ La coopération avec le secteur médico-social qui garde beaucoup trop de zones d’ombres pour identifier une réelle mise en œuvre telle qu’annoncée. Entre postes réellement créés et autorité fonctionnelle, cette coopération ne semble pas pour l‘heure entrer dans une dimension opérationnelle. Pour autant, un dialogue avec le ministère de la santé semble exister, ce qui n’était pas le cas auparavant.

En résumé
Cette mise en œuvre des PAS nous apparait trop peu claire et opérationnelle, ajoutant de nouvelles strates décisionnelles dans un paysage déjà complexe, sans réelle articulation ou complémentarité avec des opérateurs déjà débordés. Les sources d’inquiétude sont nombreuses et légitimes.

Notes de Patrick P. pour le SIEN-UNSA

 

8GT

Il y a une quinzaine d’années, je me suis engagé dans une fonction que je savais promise à évoluer mais qui devait rester une mission de cadre du système éducatif, dans le registre de l’humain, avec pour fonctions premières d’aider élèves et enseignants.

Aujourd’hui, il existe un tel écart entre le travail prescrit (ou du moins énoncé dans notre lettre de mission ou par voie de presse) et l'activité que nous déployons réellement dans un contexte d’urgences permanentes, toutes présentées comme prioritaires, que je suis bien en peine de définir ce métier. C’est devenu une gageure tant les contradictions et injonctions paradoxales sont omniprésentes.

Ce gouffre entre le prescrit et le réel est source de stress, de tensions et de surcharge qui conduisent nombre d’entre nous à l’épuisement professionnel. Dans ce contexte, il est difficile de travailler de manière productive et créative, de développer notre potentialité.

Quel sens trouver actuellement à un métier de l’humain qui s’exerce au travers d’une centaine d’applications informatiques toutes plus verrouillées et non ergonomiques les unes que les autres et dans une GRH totalement déshumanisée qui nous laisse finalement seuls face aux problèmes humains ? A une gestion du long terme qui doit se faire dans l’immédiateté, à la distribution des masques, livrets ? A une mission de service public transformée en VRP de l’autorité hiérarchique dans laquelle seule l’image prime ? Aux rendez-vous de carrière qui nous ont éloignés des classes alors qu’ils devaient nous en rapprocher ? Aux enquêtes qui deviennent « flash » pour justifier l’absence de délai ? Quand même les meilleures réformes que l’on porte loyalement sont irrémédiablement vouées à l’échec faute de savoir-faire de la haute hiérarchie en conduite du changement ; le « combien » et le « tout de suite » priment toujours sur le « comment » et le « durablement » ?

Le « pas de vague » n’existe pas, bien entendu… Mais le mécontentement exprimé des usagers conduit à retirer à l’un pour apporter à l’autre, au gré des pressions et pour éviter les remous, en l'absence de moyens (remplacements, médico-social, etc.). Acculé à une gestion palliative permanente générant d’innombrables conflits et crises, l’IEN n’est plus en mesure d’accompagner ou de protéger les personnels qui craquent, de répondre à leur mal être croissant, au sein du ministère de la bienveillance. Quand un IEN coordonnateur de PIAL s’appuyant sur un directeur d’école sans moyens reçoit comme consigne de retirer son AESH à un élève notifié pour l’affecter en priorité à un enfant dont les parents ont mis en demeure l’institution, l’accueil et l’accompagnement des EBEPs passent d’intentions louables à tartufferies visant usagers et agents.

Comment en tant que cadre organiser son emploi du temps en gérant les priorités alors que les convocations pleuvent, parfois émises par le même service pour 3 endroits différents en même temps ? Que les dates de réunion changent tout le temps ? L’IEN aguerri apprend à trier, hiérarchiser, jusqu’au rappel à l’ordre répétant qu’il n’est pas là pour décider.

La perte de sens est réelle lorsque tout ministre commence par lancer une ou plusieurs nouvelles réformes qui ne dureront que 2 à 3 ans. Quand on nous demande de défendre bec et ongle un principe puis son contraire quelques années après. Quand le cadre confine au flou le plus total, que les décisions se prennent dans la surréaction de court terme, l’agenda politico médiatique prenant le pas sur le cadre technique et humain. Le temps des médias n’est ni celui de l’enfant ni celui de la conduite du changement dans la plus grande organisation humaine d’Europe qui s’inscrivent tous deux dans le long terme. A essayer de suivre une direction qui change en permanence, on finit irrémédiablement par tourner en rond.
La perte de sens se poursuit lorsqu’on demande à l’IEN d’innover tout en ne prenant aucune initiative, en se contentant d’appliquer sans interpréter. Lorsque l’autorité départementale lui interdit de faire intervenir un enseignant du 1er degré dans le 2e degré pour lui expliquer 2 ans plus tard que c’est ce qu’il faut faire. Lorsque l’injonction d’être dans les classes et d’accompagner la pédagogie (son cœur de métier) se heurte à une réalité qui fait de lui un IEN de bureau (tant il devient impossible de le quitter) phagocyté par d’innombrables tâches d’exécution administrative. Lorsque les notes ou courriers qu’il adresse au DASEN préconisant une action urgente dans un contexte grave restent sans réponse, malgré les relances. Lorsqu’il lui est demandé de valider des missions de PACTE sans les filtrer et sans demander de projet alors que c’est l’argent de l’Etat qui est engagé.

Que penser quand on empêche les enseignants qui veulent quitter ce métier de partir ou qu’on leur refuse l’exercice à temps partiel, qu’on les pousse de fait à l’arrêt maladie et qu’on en fait des VRP de la souffrance enseignante, aggravant le déficit d’attractivité de ce métier ? Quand un IEN se voit dénier le droit d’organiser le télétravail au sein de son service et n’est pas associé à la prise de décision mais cantonné à de l’exécutif de dernière minute, à devoir sans arrêt corriger ? Quand on lui assigne des responsabilités de plus en plus importantes notamment sur les activités à encadrement renforcé, les sorties scolaires avec nuitée, le harcèlement, alors que les prérogatives décisionnelles lui sont retirées une à une comme la signature de la moindre convention d’accueil de stagiaires.

Exerce-t-il encore un métier de cadre éducatif ? Peut-on encore définir ce métier ?

Manifestement, même notre ministère n’est plus en mesure de le faire aujourd’hui.

Rémi, IEN CCPD

 

Remi

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